Littérature

L’habitude des bêtes

Dans le cadre de la rentrée littéraire 2018 et grâce au Picabo River Book ClubLéa Touch Book et les Éditions Delcourt, j’ai pu découvrir « L’habitude des bêtes » de Lise Tremblay, et je dois dire qu’au terme de ma lecture, je suis chamboulée par le texte auquel je viens de faire face.

Je pense que je vais avoir un peu de mal à mettre les mots exacts sur ce que je ressens, notamment parce que le texte en lui-même est une économie de mots. Le livre a été assez compliqué à appréhender, pas parce qu’il était dur à comprendre, mais parce que le style d’écriture de Lise Tremblay est très particulier. Moi qui aime les longs textes, avec des personnages à l’histoire chargée qu’on découvre en long en large et en travers au fil de la lecture, j’ai été assez décontenancée par ce livre d’un peu plus de cent pages.

Ce n’est pas un tort, bien au contraire, parce que les mots de Lise Tremblay frappent juste et bien, et sont à l’image de chaque personnage : tout en retenue, égrainés avec pudeur et rudesse parfois.

unnamedLe narrateur, c’est Benoît Lévesque, dentiste à la retraite. Longtemps, Benoît a vécu égoïstement, ignorant le mal-être de sa fille Carole, et la tristesse de sa femme Solange. Lui ce qu’il aimait, dès qu’il pouvait, c’était partir de Montréal, prendre son hydravion, survoler les paysages et chasser. Pour le reste, il se voilait la face en se disant que l’argent pourrait tout régler. Longtemps, il a pensé être heureux, quand il était surtout odieux et centré sur lui-même. Sa femme est partie, et sa fille s’est marginalisée.

Et puis un jour, un vieil indien lui a mis un chiot dans les bras. A partir de ce jour-là, et pour la première fois de sa vie, il s’est senti responsable et investi d’une autre vie que la sienne. Ce jour-là, il est rentré à Montréal, a pris des affaires, et est parti s’installer dans son chalet du Saguenay, au cœur du parc national, pour ne plus jamais en repartir.

Dès lors, Benoît a abandonné tout ce qu’il était jusque là. Partageant son temps entre Dan, son chien, Rémi, l’enfant du village, et Mina, une vieille dame pleine de sagesse. Avec le temps, il a fini par acquérir ce qu’il lui avait finalement toujours manqué : la bonté et l’humilité.
Les années ont passé, reposant sur cet équilibre : les balades et les siestes dans la véranda avec Dan, les petits travaux avec Rémi et les conversations avec Mina.

Mais cette année, l’automne arrive, et les loups aussi. Leur présence sur le territoire des chasseurs ravive de vieilles tensions dans le village, notamment avec l’un des clans, Les Boileau, qui intimide tout le monde. Et puis Dan, qui est vieux maintenant, est malade.

Le récit de Lise Tremblay court sur quelques mois, sur cette période charnière de la vie de Benoît et de celle de ses proches.
C’est un très beau texte, où tout est suggéré subtilement mais pourtant de manière tellement limpide et clair, que cela peut se révéler violent par moment. Un texte sur la vieillesse, le rapport à la mort, sur le temps qui passe et sur le repentir. Ce qui transpire de l’écriture de Lise Tremblay, c’est aussi l’histoire d’un homme qui a appris à aimer tardivement. A aimer sa fille, à aimer un ami, son chien, et la nature.
L’auteure décrit finalement assez peu les paysages je trouve, pourtant cette nature, on la sent omniprésente, on voit le soleil se coucher sur le lac, on sent l’odeur des arbres et on ressent les premiers frissons de l’arrivée des premières gelées.

Comme je le disais plus haut, j’ai été assez déroutée par ce texte, et ce, pendant une bonne partie de ma lecture. Mais en refermant ce livre, je me suis sentie touchée par l’écriture que je venais de parcourir, et surtout apaisée.

Un beau moment de littérature donc, sur lequel je vous conseille de vous attarder si vous en avez l’envie, et l’occasion 🙂

Le Joli

15 réflexions au sujet de “L’habitude des bêtes”

  1. Je me demande si elle est de famille avec Paul Tremblay, auteur également 🙂
    Quant au livre lui-même, je suis septique… il attendra la bibliothèque je pense, parce que j’ai peur d’être déçue – ça à l’air d’être un livre à ranger dans la catégorie : « ça passe/ça casse » donc au moins pas de déception en bibliothèque

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    1. Après vérification je ne pense pas qu’il y ait de lien entre les deux auteurs 🙂
      Je ne connais d’ailleurs pas Paul Tremblay, as-tu des titres à me conseiller ?

      En ce qui concerne L’habitude des bêtes, je te rejoins sur l’idée que tu t’en fais. Pour être très honnête, j’ai été « sceptique » (je mets des guillemets parce que ce n’est pas vraiment le terme) une bonne partie du livre, parce que j’ai été vraiment déroutée par la narration. Et puis finalement, c’est dans les dernières pages et au moment de refermer le livre que j’ai été submergée par une belle émotion.
      Ce n’est pas un livre vers lequel je serai allée de moi-même de prime abord, mais je suis très heureuse de l’avoir lu 🙂

      Si un jour tu le lis à ton tour, j’espère que tu passeras par ici pour me donner ton avis ! Merci de m’avoir lue en tout cas 🙂

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      1. Paul Tremblay n’en a écrit qu’un à ma connaissance, c’est Possession. Un livre que j’ai adoré soit dit en passant, bien qu’il ne faille pas se fier ni au titre en français, ni à la couverture pas très vendeuse… J’en ai fait une critique sur mon blog si tu veux la lire pour avoir une idée !

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  2. Ton article m’a tellement donné envie de découvrir ce texte ! Je ne connais absolument par l’auteur et je n’avais pas du tout entendu parler de cette sortie mais tes mots m’ont convaincu, surtout pour le fait que l’histoire soit courte mais aussi pour les sujets abordés.
    Je te remercie (encore) pour cette nouvelle découverte. Belle soirée Julie.

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  3. Je ne me serais pas arrêtée sur cet ouvrage si je l’avais croisé en librairie. Mais après voir lu ton avis, il éveille un peu de plus de curiosité chez moi maintenant. On verra si j’ai l’occasion de le lire 🙂

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    1. Je ne me serais pas arrêtée dessus non plus, je dois l’avouer, et ce n’est vraiment qu’au terme de la lecture que j’ai vraiment ressenti l’effet que le livre a eu sur moi 🙂
      Je ne suis vraiment pas déçue, j’espère que tu ne le seras pas non plus si tu le lis !

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  4. Autant la couverture du livre et son titre me donnaient envie de le découvrir, autant le résumé me fait douter… Je ne pense pas que ce soit le genre d’histoire qui me corresponde, du moins pas en ce moment. Je me demande comment il est possible d’aborder autant de sujets et d’avoir autant de personnages dans un si petit livre. Je ne pense pourtant pas que la quantité fasse la qualité d’un roman, mais je dois avouer être assez sceptique quant à celui-ci. Néanmoins, l’autrice doit en effet posséder un style unique pour réussir un tel tour de force!

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    1. Je pense que c’est à peu près le raisonnement que j’aurai pu avoir face à ce livre si jamais je l’avais vu en librairie ! Après l’avoir lu, je dirai que vu le style de l’auteure, on aime ou on aime pas ce livre. Il me semble compliqué d’être mitigé au terme de la lecture. Si jamais ta route croise celle de ce livre en bibliothèque et que tu te penches dessus, j’aimerai beaucoup avoir ton avis 🙂

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